Est-il possible de financer un habitat écologique sans devoir s’isoler au fin fond de la campagne? Oui, car la maison unifamiliale n’est pas la seule option pour vivre heureux. De la minimaison à l’Oasis, explorons les solutions pour vivre autrement.
Nos invités spécialisés dans la construction écologique partagent tous un avis commun. Pour tous les 3, construire des habitations plus résilientes bénéficie autant au bien-être des humains qu’à celui de la planète.
Avant de se lancer dans le vif du sujet, nous vous les présentons rapidement :
Éline Bonnemains : Conseillère en aménagement et urbanisme. Elle participe au développement du projet Construire avec le climat à destination des développeurs de l’immobilier québécois.
Alexandre Vallière : Expert en construction écologique et directeur général de l’entreprise Minid spécialisée en construction de minimaisons sur mesure.
Frédéric Wiper : Cofondateur de Solution ERA et spécialiste des Earthships. Il développe depuis plusieurs années un projet d’éco-habitats : les Oasis.
Voici qui résume les missions actuelles de nos invités. Leur expérience dans le domaine de l’écoconstruction est évidemment bien plus vaste!
Avec eux, nous allons parler d’habitations et d’écolieux pour vivre autrement : la minimaison et l’écohabitat Oasis.
Et pour commencer, on regarde comment rendre les habitations en ville plus résilientes.

Vivre autrement grâce à l’écohabitat multigénérationnel et communautaire

Solutions dans le domaine de la construction pour vivre autrement en ville

L’un des enjeux de la vie en ville est d’adapter les bâtiments aux changements causés par le réchauffement climatique.
Le Québec, comme le reste du monde, doit s’attendre à voir le climat évoluer. Construire des habitations résilientes permet de soutenir la qualité de vie des occupants même quand les conditions extérieures sont plus difficiles.
Actuellement, il y a un manque d’information pour les professionnels de la construction au sujet de la construction écologique.
Dans la pratique, construire un bâtiment aux normes et viser une certification LEED sont 2 approches complètement différentes. Les constructeurs ne savent pas toujours par où commencer pour faire leur transition écologique.
Éline Bonnemains a participé à concevoir la plateforme en ligne Construire avec le climat dans le cadre du projet Vivre en Ville. Cette plateforme apporte un accompagnement et de la formation pour les promoteurs immobiliers qui souhaitent avancer dans cette direction.
On y retrouve aussi des stratégies simples à mettre en place pour lutter et s’adapter aux changements climatiques. Contrairement aux idées reçues, ce type de projet ne nécessite pas forcément un grand niveau de complexité pour faire la différence pour l’environnement.
Pour preuve, vous trouverez sur la plateforme des exemples de projets aboutis qui ont atteint leurs objectifs de résilience.
Il est possible de faire des bâtiments écologiques qui soient abordables et faciles à concevoir.
L’objectif de ce type d’habitation écologique est double :

  • Concevoir des habitations résilientes qui sauront s’adapter aux changements climatiques futurs.
  • Réduire l’impact environnemental de nos modes de vie en construisant des habitats moins gourmands en énergie.

Et un peu à l’écart des grands centres urbains, Alexandre Vallière propose une autre manière de se loger…

Comment vivre autrement grâce aux minimaisons?

Pour Alexandre, la minimaison est une solution pour redonner du dynamisme aux cœurs villageois. Dans les régions du Québec, de nombreux villages sont en train de dépérir.
Cela est dû en partie à l’exode rural, mais pas seulement. À l’heure actuelle, les promoteurs achètent de grands lots de terrains pour leurs projets immobiliers. Étant donné que la taille de ces terrains est importante, ils ne sont disponibles qu’en dehors des villes.
Les nouveaux résidents se retrouvent à vivre en îlots fermés dans des lotissements. Et sans la proximité géographique, ils n’utilisent pas les services dans les villages.
Avec les minimaisons, les nouveaux projets résidentiels sont implantés directement dans le cœur des villages. Cela a pour effet d’en augmenter la densité de population et de les redynamiser.

La minimaison pour un mode de vie en autonomieQu’est-ce qu’une minimaison?

Une minimaison mesure entre 400 et 800 p2 (entre 37 et 74 m2) et elle est bâtie le plus souvent sur des fondations. Son design et ses dimensions sont totalement modulables, ce qui laisse beaucoup de liberté de l’adapter aux besoins des acquéreurs.
Attention à ne pas la confondre avec la micro-habitation qui fait 400 p2 et moins. Les tiny houses et les maisons construites sur roues sont des exemples bien connus de micromaisons.
Une mini-habitation se construit facilement sur le terrain d’une maison unifamiliale. Et on peut aussi en regrouper plusieurs sur un même terrain.

À quel mode de vie peut-on s’attendre en minimaison?

Imaginez que vous avez un grand-parent en perte d’autonomie ou un enfant majeur avec un handicap. Quelles sont les options pour rester proche d’eux tout en habitant à la campagne?
Il n’y a généralement ni CHSLD, ni centre spécialisé. Les possibilités sont réduites à devoir s’expatrier vers une ville qui possède les services adaptés.
Pour les familles qui ne souhaitent pas se séparer de leur proche, ce type d’habitat offre la possibilité de rester ensemble. Une personne qui a une autonomie réduite habite auprès de sa famille tout en gardant son indépendance.
Et les minimaisons s’adaptent très bien aux besoins particuliers des personnes. Comme elles sont petites, il est facile de faire de la construction sur mesure.
Il est aussi possible de regrouper plusieurs minimaisons sur un même terrain pour créer une petite collectivité. Cela donne accès à la propriété à des personnes ou des familles qui ne peuvent pas se permettre d’acheter une maison classique.
De par son expérience chez Minid, Alexandre constate que les personnes qui ont de l’intérêt pour le minimalisme en ont aussi pour une vie tournée vers la communauté.
Dans l’histoire de l’humanité, il est finalement assez récent que nous vivions chacun dans des cellules familiales de 2-3 personnes. Et beaucoup de gens aimeraient revenir à un mode de vie plus intergénérationnel ou plus communautaire.
C’est aussi le constat qui a été fait lorsque a émergé le projet des Oasis.

L’Oasis redéfinit notre style de vie

Pour la petite histoire, l’idée d e construire des Oasis est née de l’envie de trouver une solution pour proposer un type d’habitat résilient et écologique.
Au travers de ce projet, Frédéric Wiper et Francis Gendron ont contacté de nombreux experts de la construction écologique. D’ailleurs, c’est à la suite de ces rencontres que s’est construite la formation de Solution ERA : le Certificat de design de bâtiment écologique. Cette formation rassemble le meilleur des connaissances dans le domaine de l’écoconstruction.
Et au terme de ces rencontres, les connaissances accumulées ont donné les lignes directrices du concept d’Oasis.

Vivre de manière plus écologique

Quand on s’intéresse à l’empreinte énergétique de nos habitations, on est très vite surpris!
Vivre dans une tour à condos a moins d’impact environnemental que vivre dans une maison construite avec des techniques écologiques. Et cela, même si on utilise de l’énergie solaire et qu’on emploie des matériaux de construction sains.
En réalité, c’est la maison unifamiliale qui présente des désavantages difficiles à compenser même en écoconstruction :

  • Plus grande surface de terrain par habitant
  • Déperdition d’énergie par toute la surface de l’enveloppe du bâtiment
  • Plus grande quantité de matériaux à produire, transformer, transporter et recycler

Mutualiser les ressources et les projets écoresponsables

Les Oasis s’adressent aux personnes qui veulent vivre autrement sans devoir renoncer au contact avec la nature et préserver une forme d’intimité au sein de la communauté.
De l’extérieur, une Oasis ressemble à une maison du type unifamiliale. Mais à l’intérieur, c’est un cohabitat qui s’organise autour de 6 suites individuelles d’environ 200-250 p2 (18-23 m2) chacune.
Chaque suite possède une chambre avec une salle de bains privée, un bureau et un comptoir à déjeuner style cuisinette. Et dans le reste de la maison, on retrouve des espaces communs :

  • cuisine
  • espace de coworking
  • grand salon
  • salle de lavage
  • sauna infrarouge
  • etc.

Le nombre de petites suites permet de rester dans le cadre des normes de l’habitat. Par conséquent, une seule installation de gestion des eaux usées et un seul accès à l’eau potable seront nécessaires. Cela simplifie les travaux de construction et diminue d’autant les frais!
Ce mode de vie partagé permet une mise en commun des ressources et l’accès à beaucoup plus de confort pour le coût. Par exemple, investir dans des matériaux et du mobilier sains, engager un cuisiner ou un concierge, entre plus facilement dans un budget.
Et ce n’est pas tout! Les Oasis sont une opportunité d’accéder à plus d’autonomie en énergie et en nourriture. À plusieurs, il est plus facile de développer des projets annexes à la maison, comme une serre d’abondance ou un bassin d’aquaponie.
Les Oasis sont une solution abordable pour vivre autrement et tisser du lien social. Ces écohabitats permettent d’accéder à la propriété à travers un projet communautaire ou multigénérationnel.
Les avantages des Oasis sont nombreux :

  • Éviter l’étalement urbain pour protéger les territoires naturels et les terres agricoles
  • Mutualiser les ressources et modérer sa consommation (espaces de vie, mobilier, voiture, jardin, serre, etc.)
  • Limiter l’utilisation d’énergie
  • Réduire l’empreinte écologique

Les maisons écologiques Oasis redéfinissent les modes de vie

Conseils pour vivre autrement

Ces habitats écoresponsables sont encore en minorité au Québec et partout en Occident. Alors, pour celles et ceux qui souhaitent adopter un style de vie moins énergivore, il existe des pistes à suivre pour réussir son projet.

Visiter et expérimenter

Visiter des lieux déjà en place qui pourront vous inspirer :

  1. Multihabitation en ville ou en campagne : contactez Solution ERA
  2. Minimaison : contactez Minid
  3. Écohameau : contactez la Cité Écologique

Et si vous en avez l’occasion, le mieux reste encore d’expérimenter. Il existe des gîtes écologiques et des minimaisons à louer, tels que l’Oasis Sutton ou l’Oasis Eastman.
Le temps d’un weekend ou d’une semaine de congé, organisez-vous une expérience immersive. C’est encore le meilleur moyen de savoir si ce mode de vie est fait pour vous!
Sans compter que cela a vite fait de dompter les préjugés. Par exemple, quand on connaît les dimensions d’une minimaison, on pourrait penser que c’est trop petit pour y vivre à plusieurs.
Une fois à l’intérieur vous constaterez par vous-même que le design est adapté pour ne laisser aucun espace perdu. Et comme ces maisons sont plus petites, elles peuvent facilement être faites sur mesure et en fonction des activités des occupants.

Faire des recherches et bien planifier

Lancez-vous dans les recherches, informez-vous!
Dans tout projet de construction et de rénovation écologique, il existe des solutions écoabordables. Au final, elles ne reviennent pas plus chères sur le long terme que des techniques de construction conventionnelles.
Sachez que les plus grosses économies dans un projet résidentiel se réalisent grâce à un bon niveau de connaissances et de planification. Vous éviterez ainsi les mauvaises surprises, les pertes de temps et les pertes d’énergie.
C’est sur ces bons conseils que s’achève cette rencontre riche en enseignements. Nous remercions chaleureusement nos invités pour leur présence. D’ailleurs, si vous souhaitez en savoir davantage sur leurs projets, voici comment les retrouver :
Éline Bonnemains : Vivreenville.org et construireavecleclimat.org
Alexandre Vallière : Minid.ca
Frédéric Wiper : Solution ERA