Vous vous intéressez aux maisons solaires passives qui s’inscrivent dans une approche de design bioclimatique? Si pour plusieurs ce type de conception peut sembler récent, il est en développement depuis les années 70.
Pour nous en faire découvrir brièvement les fondements, Luc Muyldermans, architecte d’origine belge et grand spécialiste des habitats bioclimatiques et solaires passifs au Québec, en brosse un bref portrait. Luc est également formateur chevronné pour la formation du Certificat en design de bâtiment écologique de Solution ERA, où il partage toute sa précieuse expertise et nous rappelle en quoi ce type de conception consiste.
Qu’est que les maisons solaires passives?
Ce type de design priorise un maximum de fenestration sur la façade sud. La raison en est toute simple : le sud est la direction d’où provient le maximum de rayonnement solaire tout au long de l’année. L’objectif est de bénéficier de la chaleur abondante et gratuite qu’offrent les rayons du soleil.
En disposant la plus grande partie de la fenestration au sud et en l’équipant de pare-soleils, on maximise les gains solaires en hiver, lorsque l’angle du rayonnement est bas. Pendant l’été, on le contrôle quand celui-ci est plus haut pour éviter la surchauffe.
Ce design tend également à éviter, autant que possible, la fenestration et les ouvertures sur la façade nord, où le vent tend à être plus froid et la luminosité solaire moins directe et moins présente. Il s’agit de court-circuiter au maximum les déperditions de chaleur pour obtenir un habitat aussi étanche que possible.
Autre caractéristique fondamentale du design solaire passif : le souci de la position de l’habitat par rapport aux éléments naturels se trouvant sur le terrain, qui pourraient soit contribuer à laisser entrer les rayons du soleil dans le bâtiment, soit les bloquer (arbres feuillus ou conifères, montagnes, etc.).
Les années 70 : profusion de capteurs solaires
À cette période, on parlait surtout de maisons solaires actives. De nombreux capteurs ou panneaux solaires étaient placés sur la toiture ou la façade sud de la maison. Ceux-ci étaient responsables de réchauffer soit l’eau ou l’air se trouvant dans un système qui y était associé. L’eau était amenée à circuler dans un grand réservoir ou dans un volume important de pierres situé en dessous de l’habitat pour y transférer l’énergie captée.
En revanche, cette approche présentait certains écueils. L’un d’entre eux était que si cette conception était efficace sur le point de vue énergétique, elle avait toutefois un impact négatif sur la qualité de vie des occupants.
En effet, puisque la façade sud du bâtiment était souvent couverte de panneaux solaires, la fenestration de l’habitat se trouvait majoritairement en façade nord. Comme on le sait, cette dernière n’offre qu’une luminosité indirecte, peu intéressante pour l’éclairage naturel du bâtiment, en plus de générer des déperditions de chaleur plus importantes qu’en façade sud.
Avec le temps, une conception favorisant plus de fenestration au sud a permis davantage d’ensoleillement, de luminosité et moins de déperditions de chaleur pour offrir une plus grande qualité de vie aux occupants.
Les années 80 : moins de capteurs solaires et plus de masse thermique
Durant les années 80, la conception des maisons solaires passives s’est distancée de l’usage à outrance des capteurs solaires afin de favoriser plus de fenestrations sud et même parfois une façade entièrement fenêtrée. À cela s’est également ajouté un emploi plus commun de la masse thermique dans l’habitat afin de mieux stocker et redistribuer l’énergie solaire.
Rappelons que la masse thermique permet d’absorber et d’accumuler la chaleur du rayonnement solaire afin de la diffuser sous forme d’infrarouges (confortables et sains), la nuit ou en période nuageuse. Les masses thermiques sont constituées de matériaux denses, tels que le béton, la pierre, la brique traditionnelle ou de terre crue, l’adobe, la céramique, l’ardoise, etc.
L’installation d’un plancher en ciment, en céramique, en ardoise ou en terre crue, ou encore celle d’un mur de brique intérieur qui reçoit un fort rayonnement solaire est un excellent moyen de chauffer cette masse thermique qui diffuse doucement sa chaleur dans tout l’habitat par temps plus frais.
C’est également durant les années 80 que les conceptions ont visé à rendre l’enveloppe des bâtiments plus étanche et mieux isolée. L’installation d’un ventilateur mécanique récupérateur de chaleur (VRC) est devenue plus commune, de façon à ce que le renouvellement de l’air permette, par la même occasion, une récupération de la chaleur transportée par ce dernier.
Cependant, étant donné une meilleure étanchéité du bâtiment et la présence importante de masse thermique, un pourcentage trop élevé de fenestration en façade sud, devenue très populaire à cette période, a généré une surchauffe des bâtiments. De plus, la surface trop importante de fenestration favorisait, par la même occasion, des déperditions de chaleur trop élevées durant la nuit.
Ces extrêmes de températures influaient négativement sur le confort des occupants. Il s’agissait donc de trouver une façon d’harmoniser les conditions de vie de l’habitat tout en maintenant l’efficacité énergétique nouvellement acquise du bâtiment.
Les années 90 : une harmonisation des pratiques
C’est donc dans les années 90 que les conceptions solaires passives ont visé un usage plus réduit de la fenestration de la façade sud ainsi que de la masse thermique, afin d’atténuer les extrêmes de températures dans l’habitat. De plus, l’usage d’une fenestration plus performante offrait à présent une moins grande déperdition de chaleur durant la nuit.
C’est durant cette période qu’un travail important a été effectué pour créer différents types de fenêtres performantes. Ces recherches ont permis de mettre au point une variété de vitrages afin de répondre à des besoins différents, selon la façade sur laquelle ils étaient disposés.
Certains vitrages permettaient de laisser passer une grande quantité de rayonnement solaire dans le bâtiment, alors que d’autres étaient conçus pour fournir un facteur isolant beaucoup plus élevé qui, de façon générale, laissaient entrer moins de soleil.
L’objectif consistait donc à installer en façade sud une fenestration laissant entrer beaucoup de soleil, mais avec tout de même un bon facteur isolant afin d’éviter les déperditions de chaleur nocturnes trop importantes. Pour les orientations est, ouest et nord, l’usage de fenêtres plus isolées était à privilégier puisque la présence du rayonnement solaire y est moins importante et les déperditions de chaleur plus grandes.
Ainsi, un plus juste équilibre a pu prendre place sur le plan de la température ambiante de l’habitat, au profit des occupants bénéficiant de conditions de vie plus confortables, en plus de jouir d’une luminosité attrayante.
Les années 2000 : début des bâtiments solaires hybrides
C’est au tournant du deuxième millénaire qu’on note une tendance plus poussée vers les bâtiments solaires hybrides. Ce type d’habitat tendait à faire un plus grand usage de systèmes mécaniques qui permettent d’effectuer une gestion efficace et stratégique du rayonnement solaire.
En effet, les rayons du soleil étaient stratégiquement menés à entrer massivement dans le bâtiment, et même parfois en quantité excessive, afin que le surplus soit récupéré par des systèmes mécaniques.
Par exemple, l’usage d’une thermopompe permettait de récupérer ce surplus d’énergie solaire afin qu’il puisse être stocké soit pour le chauffage de l’eau sanitaire, soit pour alimenter en énergie un plancher radiant.
Les années 2010 : du solaire passif, hybride et du solaire actif
À l’heure actuelle et depuis les dix dernières années, la conception solaire passive ainsi que les stratégies énergétiques solaires hybrides sont toujours utilisées.
Pour répondre aux besoins des divers types de projets d’habitats écologiques, on évalue, dans des agencements variés:
- le calcul stratégique du taux et du type de fenestration selon les façades sur lesquelles les fenêtres se trouvent
- l’usage réfléchi de la masse thermique
- l’étanchéité et l’isolation du bâtiment
- l’utilisation de systèmes mécaniques
De plus, comme l’usage du panneau solaire pour la maison et surtout celui du panneau photovoltaïque – produisant de l’électricité – devient plus accessible en termes de coûts, ces derniers sont de plus en plus utilisés et permettent d’offrir une plus grande résilience et autonomie aux bâtiments écologiques.
Cela est vrai surtout en Europe ou dans les régions du monde où les ressources énergétiques sont particulièrement coûteuses, polluantes et/ou non renouvelables. Au Québec, toutefois, cette technologie demeure plus longue à rentabiliser à long terme, étant donné le faible coût de l’énergie hydro-électrique, sa grande abondance et sa très faible empreinte écologique.
Le rendement du panneau solaire photovoltaïque est celui qui permet aujourd’hui de concevoir des bâtiments à « énergie nette zéro », c’est-à-dire qui ne consomment pas plus d’énergie qu’ils n’en produisent.
Vous souhaitez en savoir plus sur la conception de maison solaire passive, active, hybride ou encore sur les stratégies à adopter pour la construction ou la rénovation d’un bâtiment plus performant (isolation, étanchéité, fenestration adéquate, etc.)? La résilience ou l’autonomie énergétique vous interpelle? Suivez le lien vers le Certificat en design de bâtiment écologique de Solution ERA!