Francis Gendron, cofondateur de Solution ERA et formateur pour le Certificat en design de bâtiment écologique, présente les différents systèmes de chauffage de l’eau dans le cadre de la conception d’un habitat écologique à construire ou à rénover. Puisqu’il s’agit de la deuxième plus grande source de consommation énergétique dans l’habitation, Francis présente des systèmes qui permettent d’optimiser la façon d’obtenir et de conserver l’eau chaude.
1. Le panneau solaire thermique
Ce type de panneau solaire est constitué d’une série de tuyaux placés sous vide et contenant de l’eau. Cette dernière est chauffée grâce au rayonnement solaire capté par un vitrage noir recouvrant l’ensemble de la tuyauterie. L’expérience des experts du Certificat ainsi que plusieurs articles publiés ces dernières années ont toutefois démontré que dans le cadre spécifique d’un habitat unifamilial québécois, ce système ne s’avérait pas nécessairement rentable sur le plan de l’investissement financier.
En effet, dans le cas d’une seule famille, le système tend à produire trop d’eau chaude en période ensoleillée et aucune en l’absence d’ensoleillement. De plus, étant donné les froids extrêmes de nos hivers québécois, la tuyauterie tend à se fragiliser avec le temps en raison des écarts importants de température qui caractérisent notre climat.
Ce système n’est donc pas tout à fait viable sur le plan financier pour les besoins réduits d’un habitat unifamilial. Son usage est en revanche très intéressant dans le contexte d’un spa, ou de tout autre bâtiment commercial ou résidentiel qui nécessite une grande production d’eau chaude pour maintenir en continu les bains à température désirée.
En utilisant un système qui combine à la fois le panneau solaire thermique et un branchement à l’électricité, ce type d’établissement peut effectuer de grandes économies énergétiques. Il bénéficie alors du rayonnement solaire gratuit durant les périodes d’ensoleillement tout en utilisant le réseau électrique pour les périodes où le ciel est couvert.
Dans un tel cas, l’investissement demeure rentable malgré le remplacement du système dû à des bris liés aux écarts de températures importants. Cela ne serait pas le cas pour une famille qui ne prend que quelques douches quotidiennes.
2. Le chauffe-eau instantané
Un chauffe-eau instantané fonctionne selon le principe suivant : l’eau froide est acheminée dans le réservoir du système dans lequel se trouve un serpentin métallique qui réchauffe l’eau immédiatement à la demande. Un robinet connecté au réservoir permet de lancer immédiatement le réchauffement de l’eau au moment de son ouverture et seule l’eau froide est accessible en continu.
Si ce genre de système fonctionne généralement au gaz (gaz naturel sur réseau énergétique ou au gaz propane pour un système autonome), il existe des systèmes de chauffe-eau instantané électrique. Toutefois, comme le souligne Francis, ils ne sont pas recommandés en contexte québécois. Ils tendent en effet à générer de soudaines courbes de consommation élevées et coûteuses pour générer de l’eau chaude de façon immédiate.
3. Le réservoir ou chauffe-eau électrique
Les bons vieux chauffe-eau électriques, présents dans la plupart des habitations québécoises standard, fonctionnent de façon différente que le chauffe-eau instantané. En effet, ceux-ci s’assurent de maintenir une certaine quantité d’eau chaude dans le réservoir afin qu’elle soit toujours disponible en cas de besoin, ce qui génère une consommation énergétique en continu et moins excessive à des moments précis.
4. Le chauffe-eau thermodynamique (pompe à chaleur)
Ce système est constitué d’une thermopompe. Elle permet de transférer à l’eau la chaleur de l’air de l’habitat ou de la serre, afin de la réchauffer pour les besoins domestiques, pour alimenter des planchers, murs ou plafonds chauffants.
L’avantage d’une thermopompe est qu’elle permet d’augmenter le coefficient de performance d’une seule unité d’énergie. Normalement, avec un appareil comme une plinthe électrique, chaque unité d’énergie pour laquelle vous payez ne génère qu’une seule unité de chaleur. Toutefois, grâce à la thermopompe, une seule unité d’énergie (électricité, gaz, etc.) peut générer de deux à sept fois plus d’énergie de chauffage, ce qui permet de faire de grandes économies.
Pour que la thermopompe maximise cette amplification énergétique, il est important que la section de l’appareil qui capte la chaleur soit installée dans un environnement où l’air est chaud et humide à environ trente degrés Celsius, comme cela est souvent le cas dans une serre. Ainsi, le coefficient de performance pourra atteindre jusqu’à sept fois l’unité d’énergie captée.
Cependant, si la température dans la serre n’est que de vingt degrés Celsius, cela n’est pas en soi problématique. Le coefficient de performance – et vos économies énergétiques – sera simplement moins élevé. Le coefficient baisse selon le niveau de température de l’environnement dans lequel se trouve le capteur de la thermopompe.
À chaque fois qu’il y a ensoleillement, même en période hivernale, la serre tend à produire un air chaud et humide qui permet de générer, via la thermopompe, une grande quantité d’eau chaude pour les besoins de votre habitat.
Selon Francis, ce type de système, qui ne peut toutefois qu’être installé dans le contexte d’une serre, est de loin le plus intéressant. Luc Muyldermans présente, dans le cadre de la formation au Certificat, les stratégies d’installation du chauffe-eau thermodynamique afin d’en retirer le maximum d’efficacité.
Il est important de souligner, cependant, que ce système n’a pas encore été concrètement mis en œuvre dans un projet de construction. Conçu de façon théorique, mais très détaillée, grâce à la riche expérience d’ingénieur et d’architecte de Luc Muyldermans, ce système vise une approche d’autonomie énergétique complète du bâtiment. Cette conception est en voie d’être concrètement mise en œuvre cette année ou, au plus tard, l’année prochaine.
Étant donné le statut encore novateur de ce système, il est possible que certaines problématiques émergent au moment de sa mise en œuvre et de son utilisation. Seul le temps pourra confirmer son niveau de performance. Ce n’est également que suite à son implantation que pourront être effectuées des séries de tests permettant, entre autres, d’évaluer si celui-ci produit un champ électromagnétique.
Francis souligne également que si ce type de système peut générer du bruit lorsqu’il est en fonction, il est important de préciser qu’il ne fonctionne pas en continu et qu’il est également possible de l’éteindre momentanément lorsque les occupants se détendent dans la serre.
Les propriétaires de serres adjacentes à l’habitat sont encore peu nombreux au Québec. Le nombre élevé d’étudiants des cohortes de la formation au Certificat en design de bâtiment écologique de Solution ERA crée cependant un bassin croissant de projets qui visent à la fois l’inclusion d’un tel type de structure et celle d’un chauffe-eau thermodynamique dans l’année à venir.
Quel chauffe-eau ou système choisir?
Quelques options s’offrent à vous si vous visez un système qui vous offre une certaine résilience ou une autonomie énergétique totale. La combinaison de certains des systèmes présentés plus haut vous permet de cibler ce qui se prête le mieux à vos besoins, autant sur le plan de votre budget, de votre niveau d’autonomie énergétique désiré que de la conception de votre habitat (qui inclue ou non une serre adjacente à votre habitation).
Si vous visez un système complètement autonome sur le plan énergétique, qui vous permet d’être entièrement déconnecté (offgrid) des réseaux énergétiques (gaz et électricité), deux options s’offrent à vous.
Dans la mesure où votre bâtiment est rattaché à une serre d’abondance, vous pouvez par exemple faire usage du système de chauffe-eau thermodynamique et d’un chauffe-eau sur demande, qui peut fonctionner en tant que système alternatif (en cas de période nuageuse) grâce à une alimentation au gaz propane plutôt qu’au gaz naturel (qui dépend d’un branchement à un réseau énergétique).
Les habitats « Earthship » font usage d’une combinaison de panneaux solaires thermiques (présentés plus haut), qui ne subissent pas les mêmes pressions de température (ils sont donc plus résilients), et d’un chauffe-eau sur demande alimenté au gaz propane pour usage occasionnel, en cas de période plus longue sans ensoleillement.
En revanche, si vous souhaitez être connecté à un réseau énergétique, que ce soit électrique ou au gaz naturel, il est possible de faire usage d’un seul appareil ou d’une combinaison des appareils présentés plus haut. Ils pourront vous offrir plus de résilience en cas de panne du système, du réseau énergétique ou lors de longues périodes sans ensoleillement.