Benoît Lavigueur, éco-entrepreneur et formateur chevronné pour la formation du Certificat en Design de Bâtiment Écologique de Solution ERA, insiste sur l’importance de s’assurer de l’étanchéité de son bâtiment en tout premier lieu et par la suite d’investir stratégiquement dans une isolation efficace de la maison.
Isolation de la maison en construction

Prioriser l’isolation de la maison pour conserver votre chaleur

Comme le souligne judicieusement Benoît, avant de penser à installer des panneaux solaires ou des systèmes de chauffage complexes et coûteux, assurez-vous que la chaleur générée dans votre bâtiment soit conservée le plus longtemps possible grâce à une excellente isolation.
Ceci est un des principes de base des maisons passives qui s’inscrit dans une approche de simplicité. L’avantage de la simplicité est qu’elle est durable en raison de sa résilience, car, comme le rappellent en continu tous les formateurs du Certificat de Solution ERA : « Tout ce qui bouge brise! ».
En bref, tout ce qui relève d’un système passif – qui maximise l’énergie et la chaleur abondante et gratuite générée par le soleil dans la maison – plutôt que d’un appareillage actif, sera toujours plus résilient à long terme.
Isolation de la maison en maximisant la chaleur du soleil qui entre par les fenêtres
Savoir conserver au maximum cette chaleur générée dans le bâtiment, par le biais d’une isolation intérieure et extérieure stratégique, efficace et de qualité, vous permet :

  • De faire des économies drastiques en chauffage – ce qui rentabilise à plus ou moins long terme votre investissement en matériaux d’isolation.
  • D’éviter la détérioration de la structure du bâtiment en raison de la présence de moisissures ou de pourritures, en ciblant l’isolant approprié à chacune des sections de l’habitat (isolation sous la dalle de fondation, en façade intérieure ou extérieure, dans le toit, ou pour les joints et les jonctions des ouvertures sur l’extérieur, etc.)
  • Offrir du confort et une qualité de vie aux occupants

Qu’est-ce que la valeur de résistance thermique d’un matériau isolant?

Chaque matériau possède une capacité plus ou moins élevée à conserver la chaleur avec laquelle il entre en contact. Plus le matériau est conducteur, plus la chaleur s’échappe vers l’extérieur de celui-ci, ce qu’on tente bien évidemment d’éviter.
Le facteur (ou valeur) « R » (pour résistance thermique) permet de quantifier la capacité d’isolation d’un matériau. Plus la valeur est élevée, plus il est considéré comme efficace sur ce plan. Le facteur de résistance thermique de la plupart des matériaux isolants, qu’ils soient naturels ou qu’ils soient de provenance pétrochimique, oscille dans un spectre d’environ R3 à R6 au pouce.
Pour bâtir l’isolation thermique d’une section de la maison, on superpose des couches successives d’isolant pour obtenir, par équation, le degré d’isolation requis. Par exemple, le code du bâtiment exige un minimum de R24,5 au pouce pour l’isolation des murs. Ceci est la norme pour les habitats conventionnels.
Isolation de la maison en construction avec l'isolation des murs
Idéalement, pour une maison plus efficace sur le plan énergétique, on devrait s’assurer d’un taux d’isolation des murs d’au moins R30 au pouce, et de R60 au pouce pour le toit. Pour une maison hautement performante, il faut davantage viser une valeur de R60 au pouce pour les murs!

Habitats conventionnels ou hyper performants : considérer la juste mesure

On parle de plus en plus de maisons hyper performantes, dont la certification allemande PassivHaus est un exemple. C’est devenu un phénomène très à la mode dans l’univers de l’éco habitation. Avec son entreprise Belvedair, Benoît a lui-même bâti le chalet modèle Missisquoi (certifié PassivHaus) à Bolton, ici au Québec.
Après son expérience de construction, il suggère à chacun de peser le pour et le contre en ce qui concerne sa propre disponibilité en ressources, en temps et en énergie, avant de considérer un projet d’une telle envergure. Ce type de certification aux critères sévères exige des investissements. Benoît se questionne sur la viabilité de pousser la démarche si loin dans le cas de la plupart des projets d’habitats écologiques québécois.
Pour illustrer les raisons de ce questionnement judicieux et stratégique, Benoît présente les données obtenues par une étude effectuée par Écohabitation. Cette dernière compare le coût des mensualités, qui incluent plus ou moins d’investissement en matériaux hyper performants, pour trois habitats de taille égale : un habitat conventionnel, un habitat à basse consommation d’énergie et finalement un habitat hyper performant.
L’étude compare une maison à basse consommation et une maison hyper-performante avec une maison traditionnelle bâtie selon le code du bâtiment :
Une maison traditionnelle bâtie selon le code du bâtiment :

  • Coût : 300 000 $
  • Consommation : 161 kWh au mètre carré
  • Coût mensuel de chauffage : 210 $
  • Hypothèque mensuelle : 1 202 $
  • Total des mensualités : 1 412 $

Une maison à basse consommation :

  • Coût : 315 000 $
  • Consommation : 49 kWh au mètre carré
  • Coût mensuel de chauffage : 60 $
  • Hypothèque mensuelle : 1 270 $
  • Total des mensualités : 1 330 $
  • Baisse des mensualités de 6 %

Une maison hyper-performante :

  • Coût : 345 000 $
  • Consommation : 12 kWh au mètre carré
  • Coût mensuel de chauffage : 16 $
  • Hypothèque mensuelle : 1 438 $
  • Total des mensualités : 1 454 $
  • Hausse des mensualités de 3 %

Une maison à basse consommation voit son hypothèque augmenter quelque peu, cependant les économies en chauffage qu’elle permet d’effectuer sont importantes (60 $ versus 210 $ par mois). Ceci permet de diminuer les mensualités de 6 % (de 1 412 $ à 1 330 $).

Toutefois, plus on augmente le niveau de performance, plus le niveau de difficulté devient exponentiel. La charge de travail augmente nettement en plus de devoir utiliser de nouveaux types de matériaux et de techniques pour atteindre les critères d’admissibilité à une certification telle la PassivHaus.
En effet, la maison hyper-performante vous coûtera 30 000 $ de plus que la maison à basse consommation, alors que les économies en chauffage restent semblables à celles de cette dernière (16 $ versus 60 $ par mois). La maison à basse consommation avait déjà permis une baisse de la moitié du coût de chauffage par rapport à l’habitat conventionnel (120 $ versus 60 $ par mois).
En conclusion, la maison hyper-performante est plus dispendieuse mensuellement qu’un bâtiment au code (3 % de plus), ce qui n’est pas le cas d’une maison à basse consommation (6 % de moins).
Isolation de la maison : plan de construction et évaluation des coûts
Les données de chauffage mensuel mentionnées dans cette étude sont celles que l’on obtient grâce au chauffage à l’hydroélectricité au Québec en 2018, si on calcule qu’un kWh (kilowatts à l’heure) coûte 0,08 $ avec le service d’Hydro-Québec. Même si ce montant est amené à augmenter avec les années, il est important de se rappeler que le Québec possède l’électricité la moins chère, en plus d’être la plus écologique et, semblerait-il, la plus fiable au monde!
En Europe, le coût et le taux de pollution élevés générés par des énergies moins vertes et non renouvelables rendent tout à fait viable, sur le plan financier, l’investissement dans une maison hyper-performante du niveau de la certification PassivHaus.
Soit dit en passant, le même phénomène s’applique à la viabilité de l’investissement massif dans des panneaux solaires, qui sont encore un peu plus long à rentabiliser au Québec.
De plus, l’importation de certains des équipements et matériaux exigés par ladite certification est un peu plus locale en Europe qu’au Québec, ce qui évite une plus grande empreinte carbone due au transport transatlantique.
À l’heure actuelle, la plupart des habitats que construit Benoît avec son entreprise sont conçus pour une consommation moyenne de 30 kWh au mètre carré. Si on se fie aux exemples de l’étude présentée plus haut, cette donnée correspond à la consommation d’un habitat qui se trouve entre celui « à basse consommation » et celui à « haute performance ».
Rappelez-vous qu’une certification comme PassivHaus n’est en aucun cas obligatoire. Sans qu’il soit nécessairement certifié, tendre vers un habitat plus performant, autant sur le plan de l’étanchéité que de l’isolation, est une solution très viable sur les plans économique et écologique.
Cette approche mitoyenne semble être celle qui convient à la majorité des individus intéressés par la conception, la construction ou la rénovation d’un habitat écologique. Cela dit, il demeure important d’être toujours à l’écoute de vos priorités, de vos désirs et de vos valeurs!

Quels isolants choisir?

Investir stratégiquement un montant un peu plus important pour bien isoler votre habitat vous assurera une consommation énergétique plus basse et une meilleure isolation thermique. Pour concevoir ce projet d’habitat éco-abordable, il vous reste à déterminer quels sont les matériaux isolants à privilégier.
Comme le rappelle judicieusement Frédéric Wiper, cofondateur de Solution ERA, la principale caractéristique d’un matériau isolant efficace est la présence de l’air dans sa structure.
Le défi pour un matériau isolant est qu’il soit à la fois constitué du plus d’air possible, tout en étant le moins conducteur de l’air avec lequel il entre en contact. Ceci évite que l’énergie thermique (la chaleur) circule aisément dans sa structure et puisse être expulsée vers l’extérieur, comme nous l’avons vu plus haut.
Grosso modo, il existe trois catégories majeures d’isolants :

  • Isolants en matériaux naturels (la plupart du temps sains)
  • Isolants en matériaux recyclés (la plupart du temps sains)
  • Isolants en matériaux pétrochimiques (souvent un peu moins sains)

À part pour quelques rares matériaux, on ne peut entièrement privilégier ou discriminer un isolant, car plusieurs éléments sont à considérer dans le choix de ce type de matériaux :

  1. Sa valeur de résistance thermique (c’est à dire son niveau d’efficacité)
  2. Sa fonction spécifique et les zones de l’habitat dans lequel il devient essentiel
  3. L’énergie grise encourue pour sa fabrication (à savoir son empreinte écologique)
  4. Son degré de perspiration (capacité à effectuer des échanges gazeux pour éliminer l’humidité et effectuer un subtil échange d’air, sans laisser, comme tel, l’air entrer) et sa gestion de l’humidité
  5. Sa provenance géographique (entraînant une plus ou moins grande empreinte écologique)
  6. Sa constitution naturelle ou plus ou moins pétrochimique
  7. Son effet sur la santé des occupants de l’habitat (matériaux plus ou moins sain)
  8. Son coût

Matériau naturel, matériau sain et énergie grise

Il est essentiel de saisir la nuance entre ce qui constitue :

  • un matériau naturel (constitué de matière généralement biodégradable et sans élément pétrochimique)
  • un matériau sain (qui ne pose pas ou peu de risque pour la santé dû à l’absence d’émanations de COV)
  • l’énergie grise exigée pour la production du matériau (empreinte carbone plus ou moins élevée qui a un impact sur l’environnement)

Un matériau peut être naturel et sain, telle la laine de roche (constituée simplement de roche volcanique) et toutefois avoir une lourde empreinte carbone étant donné le taux élevé d’énergie grise exigée pour le produire. Naturel et sain ne veut donc pas nécessairement dire très écologique!

Énergie grise pour la production de matériaux isolants

Benoît se réfère à une étude effectuée en 2005 par Archbio où il qui compare la dépense en énergie (BTU : unité d’énergie) pour la fabrication d’un pied carré d’isolant à facteur d’isolation R43. Comme on peut le noter dans les données qui suivent, les matériaux naturels tendent à porter une faible énergie grise (paille, cellulose) alors que la laine de roche et la laine de verre sont toutefois moins écologiques.
De leur côté, les matériaux isolants pétrochimiques tendent à avoir une plus forte charge en énergies grises :

  • Ballots de paille : 662 BTU (matériau naturel)
  • Fibre de cellulose : 3 075 BTU (matériau naturel / recyclé)
  • Laine de roche : 15 272 BTU (matériau naturel)
  • Fibre de verre : 23 319 BTU (matériau naturel / recyclé)
  • Polyisocyanurate : 73 288 BTU (matériau pétrochimique)
  • Polystyrène expansé : 92 250 BTU (matériau pétrochimique)

Chaque matériau possède à la fois ses avantages et ses inconvénients et sert des fonctions bien particulières.

Vous pourrez ainsi déterminer, selon vos besoins, vos ressources et vos valeurs, ceux qui conviennent le mieux à votre projet de construction ou de rénovation écologique! Pour en savoir plus, jetez un œil au Certificat en Design de Bâtiment Écologique!