Est-il possible de faire de la rénovation écologique dans une maison normale pour la rendre plus saine? Les propriétaires peuvent-ils rendre leurs maisons ou leurs condos plus verts et plus écoresponsables?
3 experts ont accepté de partager leurs conseils sur la rénovation écologique. À la fin de cet article, vous saurez quels sont les travaux prioritaires à entreprendre et où trouver des subventions pour une rénovation écologique.
Est-ce possible et est-ce une bonne idée d’entreprendre des rénovations écologiques sur une maison « normale »?
Pour Nicolas, André et Gabriel, oui, c’est tout à fait possible :
Nicolas Girouard est expert en rénovation écologique et fondateur de l’entreprise de rénovation résidentielle Les Projets de Nicolas.
André Fauteux est le fondateur, l’éditeur et le rédacteur en chef du magazine Éditions du 21e siècle. Retrouvez l’actualité du magazine sur le site Maison Saine.
Gabriel Gauthier est le fondateur et le président de 2 entreprises spécialisées dans le chanvre : Gabriel Construction Chanvre et Maison en Chanvre.
C’est au moment où le logement vieillit et a besoin d’être remis à neuf qu’il est temps de faire des rénovations écologiques. On peut alors intervenir en mettant à profit des techniques écoresponsables.
S’il n’est pas nécessaire de changer les matériaux, mieux vaut les garder. Le geste le plus écolo reste de ne pas jeter ce qui est encore en bon état.
Il est toujours plus avantageux d’utiliser le matériel jusqu’à la fin de sa vie :
- Le coût environnemental est réduit quand on limite la consommation d’énergie grise.
- Le coût économique est plus intéressant quand on investit dans ce qui est essentiel.
Prenons le cas d’une rénovation de murs. Plusieurs choix s’offrent à nous en fonction de l’état du bâtiment :
- L’enveloppe extérieure du bâtiment est à refaire : on rajoute de l’isolation avant de refaire le parement.
- Les murs intérieurs sont à refaire : on change l’isolation dans la maison.
- Les murs doivent être rafraîchis : on applique de la peinture naturelle.
Attention toutefois à vous protéger quand vous décapez les murs dans une maison ancienne.
Comment manipuler les matériaux toxiques dans les anciennes constructions?
Quand vient le temps de retirer les vieilles peintures, il y a certaines précautions à prendre. On retrouve souvent du plomb et de l’amiante dans les finis anciens.
Il faut savoir que dans les maisons construites avant 1980, on appliquait encore de la peinture au plomb. Quand on décape les murs, la poussière qui s’en dégage est très nocive pour la santé.
Avant de vous lancer, il y a des précautions à prendre :
- soit, on nettoie les murs avec de l’équipement spécifique (décapage chimique et protection),
- soit, on la recouvre totalement avec une nouvelle peinture, car la peinture au plomb n’est pas toxique tant qu’elle ne s’effrite pas.
C’est la même chose avec l’amiante. Tant qu’on ne la bouge pas, elle est inoffensive. Là encore, il y a beaucoup de précautions à prendre pour pouvoir la manipuler. Et ce n’est pas rare d’en trouver quand on rénove, car avant 1980, les mousses isolantes à base d’amiante étaient encore autorisées.
En règle générale, pour la rénovation d’anciens bâtiments, il faut bien se renseigner. Il est important que les autoconstructeurs s’informent sur la manière de se protéger. Surtout quand on sait que les habitations construites avant 1980 représentent une bonne part du parc immobilier au Québec.
D’ailleurs, les professionnels ont la responsabilité de faire des tests d’amiante sur les bâtiments construits avant 1990. C’est seulement après qu’ils pourront intervenir sur l’isolation de la structure. Cette obligation, inscrite dans les normes de la CNESST, assure la protection des travailleurs de la construction.
Quand on a un vieux bâtiment, est-il plus avantageux de détruire ou de rénover?
En rénovation, il y a toujours une part d’inconnu. Si on évalue mal la situation, restaurer peut revenir plus cher que de construire du neuf.
La première des choses est de vérifier les éléments fondamentaux de la structure. Il s’agit ici des fondations, de la toiture et de l’ossature de la maison qui doivent être en bon état. S’ils sont affaiblis, mieux vaut ne pas rénover, car on ne veut pas investir sur une structure défaillante.
La mérule pleureuse
Un exemple courant est celui de la mérule pleureuse (un champignon). Il est aussi appelé « cancer du bâtiment » parce qu’une fois installé dans une maison, la seule solution est de la détruire. Ce champignon absorbe l’humidité du bois et entraîne son assèchement. À terme, le bois se décompose et il n’est plus capable de soutenir la maison.
La mérule pleureuse s’infiltre souvent dans les anciennes constructions où on trouve un vide sanitaire en terre battue. Dans ce cas, il faut isoler le bâtiment du sol en installant un isolant de polythène sur la terre. D’autant plus qu’en isolant, on se protège du radon et de l’humidité qui remontent de la terre.
Le radon
Le radon est la 2e cause de cancer des poumons au Québec. C’est un gaz radioactif naturel qui se forme pendant le processus de dégradation de l’uranium présent dans le sol.
Au Québec, on estime qu’un logement sur 10 possède des taux de radon trop élevés. Il existe des tests à installer chez soi, pour 3 mois, en saison de chauffage.
Le test coûte à peu près 40 $ et il s’installe en… 2 secondes! La concentration à ne pas dépasser est de 200 Bq/m³ (becquerel au mètre cube). Santé Canada recommande à tout le monde de faire un test de radon.
Quand les taux sont dépassés, il est nécessaire de dépressuriser sous la dalle de béton. Et investir dans un bon échangeur d’air participe aussi à garder un logement sain.
Rénovation écologique pour budget limité, c’est possible?
Voici des actions simples à mettre en place sans partir dans les rénovations trop coûteuses pour avoir une maison plus saine.
Les enduits de chanvre sur les murs
Ils vont permettre une meilleure régulation thermique et hygrométrique de la maison ou du condo. Les enduits de chanvre ajoutent également un peu de masse thermique, favorisant ainsi la conservation de la chaleur.
De plus, les matériaux en chanvre ont des propriétés hygroscopiques. C’est-à-dire qu’ils peuvent absorber l’humidité et la diffuser quand l’air est plus sec. Cela participe à réguler l’humidité et apporte du confort.
On peut ajouter ces enduits sur les panneaux de gypse ou le vieux plâtre. On n’a alors pas besoin de dégarnir les murs, ce qui est parfait pour une rénovation écologique et économique.
Le choix des matériaux pour préserver la qualité de l’air
Quand on veut rénover ses armoires de cuisine, refaire son plancher ou rafraîchir ses murs, il faut sélectionner les bons matériaux. Tournez-vous vers ceux qui dégagent le moins possible de COV (composés organiques volatils) pour préserver la qualité de l’air intérieur.
Restez à l’affût, tout un dossier s’en vient sur le sujet sur le blogue!
Dans les commerces, on trouve encore beaucoup de matériaux qui contiennent des produits pétrochimiques. Ils auront un impact négatif en dégageant des particules toxiques dans votre habitation.
Pour les planchers par exemple, évitez les revêtements de prélart, vinyle ou PVC. Ils sont faits avec du pétrole et ils sont particulièrement irritants pour les asthmatiques.
Le marmoléum est une alternative intéressante et abordable qui ne dégage pas de COV. C’est un type de linoléum fabriqué à partir de matériaux naturels (bois, résines végétales, huile de lin, jute).
Pour les bois agglomérés, choisissez du bois certifié qui ne contient pas de formaldéhydes ajoutés :
- en Europe : classe d’émission E1
- en Californie : certification CARB (California Air Resources Board)
Quelles sont les rénovations énergétiques à entreprendre pour améliorer la performance et l’efficacité de sa maison
Bien planifier ses rénovations est l’une des clés de la réussite. Nos invités recommandent de se concentrer d’abord sur certains points prioritaires.
Misez sur l’étanchéité
Il existe une action simple pour partir sur de bonnes bases : s’inscrire au programme RénoClimat et demander une expertise.
2 évaluations énergétiques seront prises en charge par ce programme :
- 1ère visite : un test d’infiltrométrie pour l’étanchéité et des conseils gratuits pour les rénovations.
- 2e visite : un état des lieux après travaux pour constater quels ont été les améliorations apportées. En se basant sur ce bilan d’efficacité énergétique, le gouvernement vous versera des subventions pour financer une partie des travaux.
L’avantage est double pour les particuliers qui obtiennent une aide pour la rénovation écologique et réduisent leurs frais de chauffage.
Dans certains logements, les fuites d’air peuvent être responsables d’une part importante de la facture, jusqu’à 40 %! Vous pouvez rapidement faire un 1er test chez vous avec une chandelle. En faisant d’abord le tour des fenêtres et des prises électriques, puis en calfeutrant les fuites.
Mais tant qu’à avoir RénoClimat sous la main, pourquoi ne pas en profiter!
Choisissez un système de chauffage efficace
Si vous avez un chauffage au mazout, vous avez tout intérêt à le remplacer par un système électrique.
Par exemple, utiliser une fournaise réduit d’environ 30 % les coûts de chauffage. Avec une thermopompe, vous pouvez améliorer l’efficacité énergétique de votre logement et réduire vos frais d’à peu près 30 %, en plus d’augmenter grandement votre confort.
La thermopompe va générer de la chaleur grâce à un système de compression des gaz. Elle sert à la fois de chauffage et de climatiseur. Vous trouverez même des modèles qui se relient avec l’échangeur d’air, pour faire un chauffage central.
L’énergie solaire, seulement si nécessaire
Au Québec, l’électricité est verte et bon marché. Les panneaux solaires sont utiles surtout pour les habitations retirées qui sont situées loin du réseau public. Ils ont aussi l’avantage d’assurer une sécurité énergétique en cas de panne.
Toutefois, ce n’est pas l’installation la plus rentable. Des panneaux photovoltaïques seuls ne suffisent pas, vous aurez besoin d’un accumulateur et de batteries. C’est de l’équipement supplémentaire qu’il faut acheter. De plus, ces batteries ont une durée de vie limitée et elles peuvent contenir des métaux polluants comme le plomb.
Ce n’est donc pas la solution la plus écologique, mais ceux qui s’équipent cherchent avant tout la sécurité et l’autonomie énergétique, ce que les panneaux solaires peuvent définitivement leur procurer.
Quand on fait des rénovations écologiques dans sa maison, le plus important est d’assurer en priorité la santé du bâtiment. Pensez d’abord à améliorer :
- l’étanchéité
- l’isolation
- la ventilation
- le système de chauffage
Sans oublier de sélectionner des matériaux sains et naturels, exempts de produits toxiques pour la santé
Les matériaux communs à éviter
Il existe un large choix de matériaux, alors pour vous aider à y voir plus clair, commencez par éliminer ceux qui sont malsains ou peu écologiques.
La toiture en bardeau d’asphalte
À l’achat, le bardeau d’asphalte coûte 3 fois moins cher que la tôle. Mais si on compare la durée de vie des matériaux, le toit métallique dure 4 fois plus longtemps. Après un rapide calcul, on se rend compte que la tôle revient moins cher sur le long terme (ceci est vrai dans des conditions normales, et non de pénurie de tôle où le matériau pour coûter beaucoup plus cher).
Durée de vie d’un revêtement extérieur de toiture :
- bardeau d’asphalte – 15 ans
- toiture métallique – 60 ans
En ce qui concerne l’empreinte écologique, le bardeau est rarement recyclé au Québec. Même si les techniques existent, ce n’est pas une industrie assez rentable. À l’inverse, le métal se recycle très bien et vous vous ferez payer pour la récupération de votre toiture.
La toiture métallique permet également de récupérer l’eau de pluie sans la polluer de particules de goudron.
Les planchers flottants
Si on le compare avec le plancher de bois franc, le plancher flottant est un moins bon investissement. Le plancher de bois franc dure beaucoup plus longtemps et il donne de la valeur à l’habitation. Et lorsqu’il est fabriqué à partir de bois québécois, c’est un produit encore plus écoresponsable.
Au sous-sol, préférez un plancher d’ingénierie qui est plus adapté aux environnements humides et aux variations de température. Vous pouvez aussi opter pour une dalle de béton polie. Elle apporte un style contemporain et restitue très bien la chaleur. Qui plus est, comme la dalle est déjà en place, c’est le genre de rénos faciles à planifier.
Les matériaux en plastique
Tous les finis en plastique vont polluer l’air que vous respirez, car ils sont fabriqués avec du pétrole et du chlore. Utilisez-les uniquement pour isoler l’enveloppe extérieure du bâtiment.
La seule exception reste les fenêtres de PVC. Elles demeurent un choix raisonnable au niveau du rapport coût/qualité.
Par contre, optez pour du triple vitrage. Il est vrai que le prix de la fenêtre est plus élevé, mais la plus grosse part de la facture revient aux coûts de main-d’œuvre. Alors, quitte à payer l’installation, autant mettre des fenêtres qui vous feront gagner en confort et en économies!
Vous ne sentirez plus le rayonnement froid qui provient du vitrage pendant la saison froide. Vous serez aussi gagnant sur votre consommation d’électricité :
- moins de pertes de chaleur en hiver
- meilleure conservation de la fraîcheur en été.
Pourquoi se soucier des champs électromagnétiques dans une habitation saine?
Il s’avère que le corps fonctionne beaucoup mieux quand on réduit les ondes radio. C’est pourquoi, avant d’entamer des rénovations, il est conseillé de faire une inspection électromagnétique.
Au Québec, une dizaine de villes ont déjà mis en place le programme Habitation Durable. Ce programme donne jusqu’à 3 000 $ de subventions pour les rénovations et jusqu’à 8 000 $ pour les constructions neuves.
Le test électromagnétique fait partie des évaluations qui sont prises en charge. Il mesure :
- les basses fréquences qui proviennent du réseau d’Hydro et des appareils
- les hautes fréquences qui proviennent de l’équipement sans fil
Quelles sont les actions prioritaires pour les petits budgets?
Commencez par examiner et améliorer le calfeutrage de l’enveloppe du bâtiment. Vérifiez l’étanchéité des parois, les cadres de fenêtres, les bas de portes et les prises électriques.
Un autre geste tout simple : changer le pommeau de douche pour un modèle à faible débit. Sur le site d’Hydro-Québec, vous trouverez même des kits d’économiseurs d’eau. Ils s’installent en quelques minutes dans les douches et sur les robinets.
Pour quelques dollars, vous pouvez aussi acheter un hygromètre qui vous aidera à réguler l’humidité chez vous. Un bon taux d’humidité dans une maison participe à maintenir un environnement sain, autant pour les habitants que pour le bâti. Pour une maison saine, situez votre taux d’humidité entre 30 % et 50 %.
Pour les petits appartements, une ventilation efficace dans la salle de bain avec un bon tirant d’air suffit à réguler l’hygrométrie de tout le logement en hiver.
Voici qui clôture notre rencontre avec nos 3 experts. Nous espérons que ces conseils et astuces pour vos rénovations vous seront utiles!
Souhaitez-vous acquérir davantage d’outils pour rénover une habitation de manière responsable et durable? Notre formation Certificat en Design de Bâtiment Écologique s’adresse aux personnes de tous les niveaux de connaissance en construction écoresponsable!