Vous avez besoin de batteries pour une installation solaire ou éolienne afin d’atteindre une certaine autonomie énergétique? Ou encore pour l’usage d’un quelconque véhicule ou d’une génératrice? Vous souhaitez connaître l’approche la plus écologique pour réaliser votre objectif? Vous aimeriez savoir comment fonctionne le recyclage d’une batterie? Un petit dossier Solution ERA pour savoir quelles batteries choisir…

Le chaînon manquant d’un système vert

Dans notre article « Efficacité à long terme et recyclage des panneaux solaires », il est souligné qu’une très grande proportion des éléments qui composent les panneaux solaires sont à la fois recyclables à plus de 96 % et exigent un faible taux d’énergies grises pour leur extraction et leur production, ce qui est une excellente nouvelle pour l’environnement.
Il en est de même pour les véhicules électriques, qui en eux-mêmes peuvent être considérés résilients et peu polluants, car dans le cadre d’une consommation électrique au Québec, les énergies grises que génère leur production peuvent être compensées à court terme (à partir de 40 000 km) par l’absence d’utilisation d’une énergie non renouvelable pour leur fonctionnement (pétrole).
Le défi lié aux systèmes d’énergie renouvelable, tels le solaire ou l’usage de l’énergie éolienne, tient dans le fait que cette énergie verte n’est pas disponible en continue (24 heures sur 24). L’usage des batteries est donc nécessaire pour conserver et stocker cette énergie afin d’en faire un usage subséquent.
Comme le précise Rémy Prat, formateur chevronné dans le domaine de l’autonomie énergétique pour le Certificat en Design de Bâtiment Écologique de Solution ERA, parmi les différents types de batteries existantes, deux d’entre elles sont plus communément utilisées.
D’un côté, la batterie acide-plomb (sulfure-plomb) (comprenant aussi les AMG et les batteries au GEL) – consiste en une technologie grand public et plus ancienne, mais durable, efficace et recyclable, qui est toutefois plus lourde et associée à l’usage de véhicules, d’ordinateurs, de cellulaires, etc.
De l’autre côté, on retrouve la batterie lithium-ion, un peu plus récente et de plus en plus communément utilisée dans les appareils portables : montre, ordinateurs portables, cellulaires et dans les automobiles.
L'impact environnemental des batteries
Soyons lucides et transparents : pour le moment, aucun des deux types de batteries ne peut se prétendre réellement écologique, peu importe les stratégies marketing d’écoblanchiment dont font usage les fabricants pour assurer la vente de leurs produits.
Comme le souligne Frédéric Wiper, cofondateur de Solution ERA et formateur dans ce domaine, si ces deux types de batteries ne sont pas des plus écologiques de par les éléments qui les composent – comme nous le verrons plus bas –, dans le cas des véhicule électriques, elles permettent de limiter l’extraction massive et hautement polluante de pétrole, une ressource non renouvelable. Ceci est un élément majeur à considérer.
Toutefois, comme le note Emmanuel Cosgrove, fondateur d’Écohabitation : « Les batteries constituent donc le chaînon manquant à une autoproduction domestique vraiment verte. En effet, devoir stocker une énergie renouvelable et propre dans des batteries sulfure-plomb ou lithium, toxiques, inflammables et polluantes peut en rebuter plusieurs… avec raison! » (Source : Écohabitation).
La consommation d’énergie se découpe en 3 étages ;
1 L’usage : quelle est ma façon de consommer de l’énergie? Suis-je sobre en énergie?
2 L’efficacité ; quels sont mes choix dans les appareils et produits que j’achète en terme de consommation d’énergie? Puis-je trouver un produit plus efficace, plus performant pour une durée de vie plus longue?
3 Les énergies renouvelables ; quelles sont les productions d’énergie qui peuvent répondre à mes besoins? Si j’ai pu réduire ma consommation et que maintenant, j’utilise du matériel performant, mon système solaire va-t-il maintenant répondre à mes besoins? Car si j’ai un besoin d’énergie de nuit qui est décalé par rapport à la production solaire de jour, comment puis-je répondre à mon besoin tout en stockant mon énergie correctement?
 

Le recyclage d’une batterie acide-plomb

Dans la formation « Autonomie énergétique », Rémy Prat arrive avec une lueur d’espoir en soulignant que les batteries acide-plomb, les plus utilisées à grande échelle, sont recyclables à 99 %.
Un tableau qu’il présente, provenant du regroupement des manufacturiers de batteries, le Battery Council International, démontre que la quasi totalité des éléments d’une batterie acide-plomb se récupère en entier.
En effet :

  • Le bac de plastique est déchiqueté pour la récupération des morceaux
  • Le plomb est également récupéré
  • L’électrolyte – le liquide au fond de la batterie (composé d’acide et d’eau) – est récupéré soit tel quel, car une partie de l’industrie en fait usage, soit en retirant l’eau et en réutilisant l’acide
  • Le transport de livraison des batteries est simultanément utilisé pour leur récupération à des fins de recyclage

Recyclage batterie - Solution ERA

Photo : Battery Council International


Toutefois, il est fondamental de faire la nuance entre :

  • L’impact environnemental de l’extraction des matières premières qui les constitueront ainsi que l’énergie grise encourue pour ce faire, qui peut également laisser une empreinte écologique importante
  • La possibilité de recyclage du produit manufacturé
  • La composition d’une batterie acide-plomb

Prenons un exemple concret pour illustrer cette nuance. La batterie acide-plomb est constituée d’un boîtier de plastique qui forme un squelette, ou grille de support, qui prend la forme d’une structure grillagée et dans laquelle on vient greffer du plomb.
Ces sections sont arrimées les unes aux autres par des connecteurs. La quantité de plomb qui constitue l’amalgame qui sera greffé à chaque cellule de la structure grillagée déterminera la qualité (et bien sûr le coût) de la batterie.
L’amalgame d’une batterie standard, de basse ou moyenne qualité, sera composé d’un mélange de plomb (pur ou recyclé) à 50 %, et de 50 % d’autres métaux recyclés de faible qualité (dont le distributeur ne se vantera pas au moment de la vente).
Une batterie de haute qualité (à coût plus élevé) sera composée d’un amalgame de plomb pur à 99,9 %, dont le distributeur sera fier de vanter la pureté.
Ce petit aparté sur la composition des batteries acide-plomb permet de souligner que peu importe que celles-ci soient d’excellente qualité ou de qualité moindre, il n’en demeure pas moins que les matériaux qui la composent, même s’ils sont entièrement recyclables, sont tout de même des matériaux ayant un impact environnemental non négligeable (surtout le plomb). Pourquoi?

L’impact environnemental du plomb

Comme le souligne Écohabitation, des pays tels que la Chine et l’Inde, qui sont responsables d’une part importante du développement des technologies solaires, se doivent, faute de réseaux de distribution fonctionnels, de stocker cette énergie produite sur des batteries au plomb très polluantes.
Une étude scientifique dans la revue Energy Policy, démontre qu’en effet, cette situation se traduit par un rejet de l’ordre de 2 400 kilotonnes de plomb dans l’environnement, soit environ un tiers de la production mondiale de plomb! (Source Notre-Planète.info)
Si le rejet du plomb dans l’atmosphère est néfaste pour l’environnement il l’est également pour les humains, soit par le biais de doses uniques en quantité élevée, soit, et c’est le cas plus couramment, par le biais d’une exposition longue à faible dose.
L’empoisonnement au plomb cause notamment des « pertes de mémoire, mais il est aussi à l’origine d’une dégradation du système cardiovasculaire et, dans le cas des femmes enceintes, de fausses couches et d’accouchements prématurés ».  (Source Notre-Planète.info)

Le recyclage d’une batterie lithium-ion

Certains sont alors tentés de se tourner vers les batteries lithium-ion (moins communément utilisées par le grand public). Sont-elles plus écologiques?
Le lithium est un métal utilisé entre autres pour les piles et les batteries (31 %), mais pas uniquement. Son extraction est importante et prend place principalement dans des lacs salés de l’Amérique du Sud (Chili, Bolivie et Argentine), ainsi qu’au Tibet et en Afghanistan.
« La production, le plus souvent opérée par évaporation de l’eau de ces lacs, requiert de grandes quantités d’eau : des pénuries s’en suivent, en plus d’une pollution des sols et des réserves d’eau. […] les effluents miniers ne sont malheureusement pas traités de manière adaptée ». (Source : Écohabitation)
Ceci entraîne des conséquences sociales graves puisque l’exploitation du lithium a un impact sur l’approvisionnement en eau pour l’agriculture et l’usage domestique.
De plus, sur le plan de l’équité, les pays producteurs du matériau brut : le carbonate de lithium – qui à cette phase n’offre qu’une faible valeur monétaire – ne disposent souvent pas des moyens (technologies, infrastructures et main-d’œuvre compétente) pour transformer le lithium et produire eux-mêmes des batteries.
Le matériau brut est ainsi vendu sur le marché international à bas prix, et les pays industrialisés qui ont les infrastructures pour le transformer réalisent alors le plus gros des bénéfices. (Source : Écohabitation)
À l’heure actuelle, le recyclage des batteries au lithium est réalisable et organisé jusqu’à un certain point, mais il semble que son efficacité n’est encore pas optimale, comme le souligne Emmanuel Cosgrove d’Écohabitation.

Existe-t-il des alternatives?

La batterie sodium-ion

Il existe aussi les batteries sodium-ion. « L’idée d’utiliser du sodium pour stocker l’énergie remonte aux années 1990. Mais en raison de leur meilleure performance et de la légèreté de leurs ions, les accumulateurs au sodium ont été écartés au profit du lithium. Aujourd’hui, avec une demande grandissante pour le stockage d’électricité, l’utilisation du sodium a refait surface.
Le grand bénéfice environnemental : la ressource est 1 000 fois plus abondante que le lithium et renouvelable! De plus, le sel est une ressource bien moins dispendieuse que le lithium. » (Source : Écohabitation)
Sel pour les batteries sodium-ion
Ce type de batterie est disponible sur le marché depuis relativement peu de temps. Il est donc difficile d’en faire un bilan complet. Toutefois, certains avantages et inconvénients liés à ce type de batteries sont à souligner.
Les aspects liés à son impact environnemental sont listés ici, toutefois, pour plus de détails techniques sur ce sujet et sur ce type de batteries, jetez un oeil à cet article d’Usine Nouvelle.

Avantages de la batterie sodium-ion

  • Elle n’est composée d’aucun produit chimique toxique ni de métaux lourds (pas explosive, ni inflammable ou corrosive)
  • Durable, sa durée de vie oscille entre 2 000 et 3 000 cycles (soit environ 10 ans)
  • Elle peut être déchargée jusqu’à 90 % de sa capacité – alors que les piles au plomb et celles au lithium ne doivent pas être déchargées sous 50 % de leur capacité (si on ne veut pas raccourcir leur durée de vie)
  • La batterie AHI créée par Aquion est également la première à obtenir la certification Cradle to Cradle, une analyse du cycle de vie qui mesure l’impact écologique globale d’un produit. Elle est composée uniquement de carbone, de coton, d’eau salée et d’oxyde de manganèse (MnO)
  • On peut faire le recyclage de cette batterie dans son ensemble, sans aucun déchet dangereux à gérer en fin de vie

Elle possède aussi d’autres avantages sur le plan technique. Sur le plan des inconvénients elle n’en présente pas pour le moment sur le plan écologique, mais, soulignons simplement ceux-ci.

Inconvénients de la batterie sodium-ion

  • Une taille plus grande du fait des ions plus volumineux (trois fois plus gros que les ions lithium)
  • La quantité d’électricité qui peut être stockée dans ces batteries s’apparente à celle des batteries lithium à leur début, soit environ 90 Wh/kg. Les chercheurs s’attendent à ce que la batterie fasse des progrès rapides à ce niveau, tout comme l’a fait la batterie au lithium, qui a vite dépassé les 200 Wh/kg.
  • Prix élevé à environ 1 900 $ pour le modèle 48V, la batterie AHI se situe à peu près au milieu de l’échelle de prix des piles (plus abordable si on prend en compte sa longévité)

La batterie au graphène

La batterie au graphène existe également, mais comme nous ne la connaissons pas beaucoup, nous préférons prendre le temps d’en apprendre plus sur elle, et nous vous reviendrons dans un article futur à son sujet!

Conclusion : en attendant, quelles options s’offrent à vous?

Il n’existe pour l’instant pas encore de solution dite « miracle » de batterie, aussi verte que performante et accessible au budget de tous, même si la batterie sodium-ion semble prometteuse. D’ici là, que choisir?
Si la vocation du centre de formation que constitue Solution ERA n’est pas de prendre position dans ce type de débat, il est toutefois important d’offrir le maximum d’information neutre sur le sujet afin que le lecteur puisse s’en faire sa propre opinion et effectuer, en toute connaissance de cause, les choix de produits qui conviennent aux besoins de son projet et aux valeurs qu’il porte.
Donc, en attendant que la batterie « miracle » n’atterisse sur les présentoirs des fabricants. Il est possible de décider de :

  1. Continuer à faire usage de batteries acide-plomb en connaissance de cause, par exemple en choisissant un modèle à coût plus élevé (batteries AGM et GEL) et qui, même si elles sont constituées de matériaux toxiques et à forte énergie grise, sont tout de même entièrement recyclables.
  2. Continuer à faire usage de batteries lithium-ion, qui, malgré les impacts négatifs écologiques et sociaux élevés, sont tout de même recyclables et permettent d’alimenter des véhicules électriques et des systèmes énergétiques plus verts qui contrebalancent leur empreinte écologique. L’extraction des matériaux qui les constituent serait un sacrifice à effectuer pour créer un système mondial plus résilient à long terme une fois le nombre de batteries nécessaires produites.
  3. Adopter la batterie sodium-ion, qui malgré qu’elle n’a pas encore passé l’épreuve du temps et coûte un peu plus cher pour ses performances, est une technologie verte et prometteuse.
  4. Attendre un système de batteries qui soit prouvé aussi résilient et écologique les systèmes solaires, éoliens ou les voitures électriques qu’il alimenterait… Que cela soit par le biais d’une composition à base de matériaux qui ont une empreinte écologique et sociale moins lourde, ou de technologies moins polluantes, ou de politiques plus équitables, qui permettent une extraction des matériaux moins nocive sur le plan écologique et social.
  5. Sinon, comme le souligne Frédéric Wiper, en attendant la perfection, on poursuit la construction de centrales nucléaires, l’usage du charbon ou des énergies fossiles, et on continue à se déplacer avec le pétrole « équitable » canadien ou moins polluant de l’Arabie saoudite (puisque les sables bitumineux sont plus polluants que l’extraction traditionnelle du pétrole).

Bref, il n’y a pas de réponse miracle! À vous de faire usage des données qui vous sont offertes pour juger de ce qui vous semble le plus à même de répondre à votre projet écologique, vos besoins et vos valeurs!
Pour plus d’informations sur les batteries, les systèmes et la résilience ou autonomie énergétiques, abonnez-vous sur la série de vidéos gratuites sur l’autonomie énergétique.
Sources :
Formation sur l’autonomie énergétique par Rémy Prat dans le cadre du Certificat en Design de Bâtiment Écologique de Solution ERA
« Chine et Inde, quand le solaire empoisonne » par Écohabitation
« L’industrie de l’énergie solaire entraîne une pollution majeure au plomb » par notre-planète.info
« Lead emissions from solar photovoltaic energy systems in China and India », dans . Energy Policy, 2011; 39 (9): 4939 DOI: 10.1016/j.enpol.2011.06.021 par Perry Gottesfeld, Christopher R. Cherry
« Produit du mois : la batterie à l’eau salée » par Écohabitation
« Pourquoi la petite batterie sodium-ion mise au point par le CEA et le CNRS a tout d’une grande » par L’Usine Nouvelle