Le choix stratégique lors de l’achat d’un terrain pour la construction de son habitat écologique est une étape majeure qui peut avoir un impact décisif sur la réalisation de votre projet, tant sur le plan financier que sur votre future qualité de vie.

pancarte devant un terrain

 

Acheter un terrain avant toute autre chose

 
Comme nous l’avons vu dans le blogue « Le financement de votre projet de maison écologique », le choix stratégique, l’achat et le paiement entier d’un terrain approprié doit être réalisé avant même les étapes de demandes de financement auprès d’institutions financières prêteuses, pour la construction de votre habitat écologique.
Benoît Deschamps, un des grands pionniers des « Earthships » québécois, ainsi que Benoît Lavigueur, entrepreneur d’expérience dans le domaine de la construction écologique, sont aussi formateurs pour le Certificat en Design de Bâtiment Écologique de Solution ERA.
Voici quelques-uns des conseils incontournables qu’ils offrent lors de leurs formations, afin de faire des choix informés et lucides pour l’achat d’un terrain dans le but de se construire au Québec.
 

Type d’environnement et coûts 

 
Comme le souligne Benoît Lavigueur, choisir un terrain qui vous plaît est un facteur important, mais s’assurer que vous êtes en mesure de le payer est encore plus essentiel! Si la majeure partie du budget de l’ensemble de votre projet est attribué à l’achat du terrain, vous risquez de ne pouvoir mener à terme la phase de construction.
En effet, tel que discuté dans le blogue « Planifier un budget pour se construire », assurez-vous de choisir un terrain dont les coûts de services et d’installation d’infrastructures seront à la mesure de votre budget.  
Par exemple, les terrains en montagne coûtent souvent plus cher en infrastructures, étant donné le dynamitage souvent nécessaire pour l’installation des services de base (chemin d’accès, puits artésien, fosse septique et champ d’épuration).
Autre élément à considérer : on peut apprécier la large superficie d’un terrain, toutefois il est important de se rappeler que cela demande plus de frais d’aménagement et peut être énergivore, selon le temps dont vous disposez pour son entretien.
De plus, contrairement aux régions rurales, vivre en ville ou en banlieue peut comporter certains avantages. Par exemple, votre terrain bénéficie de l’accès à l’égout et à l’aqueduc qui ne vous coûtent que 2 000 $, au lieu de 25 000 $ de frais d’installation d’un puits et d’un champ d’épuration!
Cela vous évite aussi la gestion d’une pompe pour le puits et des frais d’entretien récurrents en lien avec le champ d’épuration. Toutefois, l’inconvénient est que les terrains sont plus dispendieux en ville comme en banlieue et que vous êtes en une plus grande promiscuité avec l’activité urbaine.
Comme nous l’avons vu dans le blogue « Des maisons écologiques qui font économiser beaucoup dans un esprit de partage », le partage de certaines infrastructures coûteuses peut être une stratégie gagnante si l’on souhaite réaliser un projet en région rurale ou dans un éco-quartier plus ou moins urbain.
Comme le souligne Benoît Deschamps, faites un comparatif de prix pour le terrain. Ne cherchez pas juste dans votre quartier, allez voir plus loin, dans différentes régions ou municipalités. Ceci permet au moment de la négociation du terrain d’avoir des arguments éclairés, basés sur une connaissance des prix dans d’autres secteurs.
Il est aussi important d’être au fait de son type de voisinage. Partagent-ils vos valeurs? Si vous faites du compost et que vous avez des poules en liberté dans votre cour, est-ce que cela sera accepté par vos voisins, ou cela risque-t-il d’engendrer des plaintes de leur part? Dans un tel cas, l’installation dans un éco-quartier peut être une solution viable.
 

Isolement du terrain par rapport à la civilisation

 
C’est une question importante à se poser, car on peut trouver des terrains excentrés à des coûts très abordables, mais le chemin sera-t-il déneigé l’hiver? Si vous avez des enfants, la routine quotidienne sera-t-elle encore plus énergivore en raison des aléas du transport, s’il n’y a pas de service d’autobus scolaire? La proximité des services ou de son lieu de travail sont aussi des éléments importants à considérer.
Du point de vue social, il est aussi essentiel de pouvoir identifier de façon lucide ses besoins et ceux de sa famille. Par exemple, Benoît a trouvé dans son éco-quartier des familles avec les enfants desquelles ses filles pouvaient jouer. C’était un facteur important dans son choix de terrain.
Encore une fois, l’éloignement de la civilisation et des services engendrera toujours plus de coûts parfois même très importants pour l’accessibilité à la route ou pour le branchement aux services de base (Hydro-Québec, Bell, internet, etc.).
maison et ferme dans un champs

Ouverture de la municipalité à un projet écologique

 
Pour vous faciliter la tâche, il peut être intéressant, comme l’a fait Benoît, d’identifier dès le début des municipalités qui ont déjà accueilli des projets écologiques. Que ce soit au sein d’éco-quartiers ou d’éco-communautés, ou des projets uniques de maisons écologiques. (Les éco-communautés sont en grand essor, il existe d’ailleurs un groupe facebook et une chaîne youtube dédiés à faire découvrir les éco-villages du Québec et des États-Unis!)
Cela vous donne la chance de rencontrer plus de gens qui sont sur la même longueur d’onde que vous sur le plan des valeurs, en plus de transiger avec une municipalité qui est plus ouverte à des visions alternatives.
Approcher les officiers municipaux et discuter avec eux en personne de votre projet sera toujours une approche gagnante d’ouverture et de transparence, en plus de démontrer votre diligence à collaborer avec eux.
Cette ouverture et ce respect des lois et réglementations municipales et provinciales seront des facteurs décisifs dans la viabilité et réalisation de votre projet, comme nous en avons discuté dans le blogue « Habitations écologiques et municipalités – Normes de construction ».
En conservant de bonnes relations avec les représentants de votre municipalité, vous vous assurez une plus grande fluidité dans les étapes de réalisation de votre construction, qui dépendent souvent de l’approbation de ces représentants.
La transparence avec la municipalité est incontournable, toutefois, comme le rappelle aussi Benoît Lavigueur, lors de la présentation du projet à financer auprès d’une institution financière prêteuse, évitez de rentrer dans les détails techniques qui risquent de jouer contre vous si votre approche est assez alternative.
 

Choix du zonage 

 
Benoît Deschamps rappelle qu’il est très important d’être au fait sur cet aspect, car plusieurs projets écologiques ont été bloqués en raison de problèmes de zonage. Quelles sont les normes municipales associées au type de zonage de votre futur terrain? Qu’est-ce qui y est permis et qu’est-ce qui ne l’est pas?
En effet, le zonage résidentiel est subdivisé en sous catégories : « résidentiel spécial », « résidentiel fermette », « résidentiel écologique », etc. À quelle catégorie votre projet se rattache-t-il? Chacune de ces catégories est associée à un code (ex. 204) duquel découle toute une série de normes. La plupart des municipalités québécoises suivent un modèle similaire, mais il reste fondamental de bien s’informer sur les normes de la municipalité concernée.
 

Orientation du terrain et densité de la végétation

 
Comme pour tout projet de maison écologique, idéalement solaire passive, pouvoir bénéficier de l’énergie gratuite et abondante du soleil est un facteur important. Idéalement, l’habitat devrait pouvoir être orienté au Sud.
Lors de la visite du terrain, observez la zone qui abritera votre futur habitat. Est-elle couverte d’arbres feuillus qui perdent leurs feuilles en hiver (ombre l’été et soleil l’hiver) ou d’épinettes de 30 pieds de haut (qui protègent des vents du Nord, mais cachent le soleil essentiel au Sud en hiver)? Cela peut faire une grande différence dans votre apport solaire en hiver. Les axes Est et Ouest sont-ils aussi relativement bien dégagés pour recevoir un ensoleillement approprié?
 

Topographie du terrain

 
La topographie du terrain aura également un impact sur la conception du bâtiment lui-même. Comme le rappelle Benoît Lavigueur, il y a quelques facteurs à considérer selon le type de fondations que l’on souhaite, et si l’on désire un sous-sol ou un rez-de-jardin.
Par exemple, il n’est pas possible d’installer une dalle monolithique sur un terrain montagneux en pente. Et attention, ne vous fiez pas à vos seuls yeux pour évaluer le degré d’une pente sur votre terrain!
Par expérience, après la visite de plus de trois cents terrains dans sa carrière d’entrepreneur, Benoît Lavigueur affirme qu’il est courant que le facteur réel de pente soit le double de celui évalué par l’œil humain. L’usage d’appareils de mesure et de niveaux pour prendre des relevés exacts est incontournable pour avoir l’heure juste sur ce facteur décisif sur vos plans de construction.
Vous pouvez faire des tests grâce à des appareils qui se vendent à faibles coûts (5 $ à 10 $) en quincaillerie. Il s’agit de petits niveaux de lignes en métal qui peuvent être suspendus à une longue corde tendue entre deux points. C’est ce que les maçons utilisent pour assurer le niveau de leurs murs.  
Si vous souhaitez un rez-de-jardin, il possible de le faire sur un terrain très légèrement pentu. Cela s’applique également à un design de maison avec sous-sol.
 

Analyse de sol

 
Est-ce que le terrain est constitué principalement de roc, d’argile ou de sable? Effectuer un sondage du sol au moment de la visite pourrait vous faire économiser des milliers de dollars par la suite.
En effet, avant d’acheter le terrain, parcourez-le, et amenez avec vous une pelle pour un petit sondage très simple. Avec un échantillon, vous pourrez identifier le type de sol et faire faire une analyse pour quantifier le niveau d’argile. Plus le sol est argileux ou même rocheux, plus il faudra du dynamitage  – avec les coûts que cela encourt pour y instaurer les infrastructures de base.
 

Nappe phréatique

 
Vous souhaitez faire installer un puits artésien sur votre terrain? Vérifiez la profondeur de la nappe phréatique en faisant faire une excavation. Le meilleur moment pour le faire est au printemps ou lorsqu’il pleut abondamment en automne.
C’est une étude peu coûteuse qui vous sauvera potentiellement beaucoup d’argent. Plus la nappe phréatique est basse, plus les coûts pour creuser un puits seront élevés, d’autant plus si le sol est argileux ou rocheux et qu’il faut dynamiter.
 

La proximité d’étendues d’eau et les zones inondables

 
Y a-t-il un lac ou une rivière, sur ou à proximité de votre futur terrain? Attention que ce cours d’eau n’ait pas une propension aux inondations. En effet, les terrains qui jouxtent certains affluents sont parfois classés zones inondables et vous pourriez vous éviter des milliers de dollars en dégâts éventuels en le sachant d’avance!
Attention, il y a parfois certains champs d’agriculteurs qui peuvent également être classés zone inondables, alors ne vous fiez pas au fait qu’il soit cultivé ou cultivable. Ces vérifications peuvent être effectuées auprès de la municipalité concernée.
 

Usages précédents du terrain

 
Les usages précédents du terrain sont également importants à considérer pour des facteurs de santé, et aussi dans le cas où vous souhaitez implanter un projet de culture biologique.
Une ancienne station-service pourrait avoir lourdement contaminé d’essence le sol de votre futur lieu de vie et de culture maraîchère. Restez alerte et fiez-vous à votre bon sens : si on vous offre un terrain de 100 000 pieds carrés à 10 000 $, posez-vous de sérieuses questions sur la réelle valeur à long terme de cette aubaine!
Si vous souhaitez vous renseigner davantage sur les thématiques incontournables à la réalisation de votre projet écologique, suivez ce lien!